Le 1er Novembre 1185, Philippe d'Alsace, comte de Flandre à la suite de démélés survenus avec son beau-frère Bauduin V comte de Hainaut se mit en mesure de lui déclarer la guerre et jura de tout exterminer en Hainaut par le fer et le feu.
A cette fin, il attira dans son parti plusieurs princes et seigneurs puissants tels que Philippis archevêque de Cologne, le duc de Brabant et son fils Jacques d'Avesnes, qui naturellement avaient oubliés tout ce qu'ils devaient au comte de Hainaut et croyaient même avoir à se venger de lui, puisqu'ils promirent au comte de Flandre de lui livrer toutes les places qu'il possédait en Hainaut.
De son côté, Bauduin prépara ses villes et châteaux pour une vigoureuse résistance. Les frontières du Cambrésis furent gardées par de fidèles vassaux. Otton de Trazegnies fut chargé de surveiller la terre du Quesnoy avec un gros détachement. Les gens de la campagne se retirèrent dans les lieux fortifiés avec leurs vivres et leurs bestiaux.
Une fois ces sages dispositions prises, Bauduin V attendit de pied ferme l'invasion dont il était menacé, relevant le courage de ses soldats par sa gaieté et sa confiance : " Courage, beaux sires, disait-il à ses chevaliers, nos ennemis seront bientôt forcés par la saison de se retirer, et ils ne pourront emporter nos terres."
( Hossart t.1 p.306 )
Le 1er Novembre 1185, le Hainaut était envahi de tous côtés à la fois.
( J. de Guise dit d'après Baldéric : "
Comes Flandriae cum Jacobi de Avesnis intervenant per Cameracum in Hannonia et aucuperant villis Sampiton, Haussi
" 399 T XII p. 40 )
Le comte Philippe d'Alsace qui conduisait avec lui 40.000 hommes d'infanterie, 1.000 cuirassiers et 500 chevaliers se jeta dans cette province par le Cambrésis et vint camper à Viesly. Le duc de Louvain et l'archevêque de Cologne que Philippe d'Alsace avait su gagner à sa cause ravageaient déjà les confins de la forêt charbonnière et s'avançaient vers Mons. De son côté, Bauduin V qui s'était avancé jusqu'au village d'Auberchicourt dans le dessein de pousser une chevauchée sur les terres de Flandre, s'était replié sur Mons.
La lutte en rase campagne devenait impossible pour le Hainaut. Le sire de Trazegnies, qui commandait au Quesnoy tenta une sortie vigoureuse et tomba sur une aile de l'armée du comte de Flandre, lui tua beaucoup de monde et lui fit un nombre considérable de prisonniers. Ce coup d'audace n'empêcha pas les flamands de continuer leur marche à travers le pays. Ils se vengèrent aussitôt laissant partout sur leur passage les marques de la plus affreuse dévastation, s'emparant des forts de Solesmes et de St-Python et firent le siège du fort d'Haussy. Le peu d'élévation que les murs avaient alors et la faiblesse de la garnison, l'en laissèrent bientôt le maître, ils y mirent le feu et renversèrent les murailles. Mais cet incendie ne détruisit pas complètement la forteresse, on la rebatit et on la fortifia avec plus de soin, car elle eût encore de rudes assauts à soutenir pendant les guerres qui se firent dans le Hainaut aux XIII et XIV siècle.
( Hossart Histoire du Hainaut)
Les flamands continuèrent à ravager la campagne jusqu'aux portes du Quesnoy, ne laissant derrière eux que longue trainée de flammes.
" Et progressi sunt camburendo usque ad Quercitum ". ( J. de Guise t. XIII p.400 )
Pour comble de malheurs, cette année 1185 fut signalée par des phénomènes étranges: On eut jugé que les saisons étaient en guerre l'une contre l'autre et voulaient changer de condition. Les arbres à fruits fleurirent au mois de Décembre; en Février, les poires et les pommes étaient déjà de la grosseur d'une noix Tout fut réellement en désarroi dans la nature, si bien que les oiseaux, trompés eux mêmes, firent leurs nids en Janvier.
L'hiver prit sa revanche; les froids arrivèrent en Mars et durèrent jusqu'en Juin. Il neigea abondamment en Mai à la Pentecôte. Puis, au mois de Juillet, une furieuse tempête accompagnée de tonnerre, de grosses grêles et de pluies traversa le Hainaut, abattit et brisa les bleds sur les campagnes, renversa les arbres, tua les oiseaux, les lièvres, les bestiaux et les bêtes fauves dans les champs et les forêts Les grelons étaient de la grosseur et de la forme d'oeuf de poule. Ces phénomènes sont heureusement rares mais ils ne peuvent être révoqués en doute.
( d'Oultreman, Delwarde )
Ces dévastations survenues après les désastres de la guerre méritent d'être signalées dans les chroniques comme une de ces calamités mémorables dont certaines époques semblent avoir le privilège.
Réf.: Histoire de Haussy par l'abbé Jules Denis